par Marlène Bouillon, Dt.P., Ph.D.,
Nutritionniste-Diététiste et docteure en physiologie/endocrinologie, Directrice scientifique
En tant que nutritionniste-diététiste clinicienne et directrice scientifique, je ne cesse de répéter que se nourrir est un acte naturel, intuitif et ne devrait pas avoir une visée de corps parfait ou « bikini body », pas plus que bouger devrait avoir comme seule finalité de perdre du poids!
Comme le mouvement ÉquiLibre le dit tellement bien :
« Bougeons sans pression! Bougeons pour les multiples bienfaits sur le corps et l'esprit. Or, l'industrie du fitness nous envoie souvent comme message no pain no gain, il faut souffrir pour être belle, etc. »
Vidéo 👇🏻
Ce type de pression ne fait que décourager les gens, qui après plusieurs traumas durant l'enfance, voient l'exercice comme un punition et non comme un plaisir.
Par exemple, prenez le cas extrême ci-dessous, qui s'est produit dans la société actuelle :
Aux États-Unis, un père a été condamné tout récemment pour avoir fait courir pendant plusieurs jours son fils de 6 ans sur un tapis roulant à une intensité et durée inadéquates pour son âge et son gabarit parce qu'il le trouvait un peu gros!!! L'enfant est décédé quelques jours après des conséquences « de blessures contondantes, ainsi que de contusions cardiaques et hépatiques, d'une inflammation aiguë et d'une septicémie ».
Nous devons prendre conscience que tous les commentaires sur le poids font mal, ils peuvent détruire une vie! Nous devons travailler notre compassion envers les autres et faire preuve d'ouverture, accepter les différences pour un monde meilleur.
Pourquoi est-ce important de répéter ce message?
Parce que que bouger ou manger est un acte naturel qui devrait se faire dans le plaisir. Nous semblons avoir perdu de vue cette notion et on doit la retrouver. La culture des diètes, les réseaux sociaux et le marketing nous font basculer en mode comparaison. Pourtant, nous sommes tous uniques! On en vient ainsi à oublier d'aimer la vie, d'entretenir notre joie de vivre tout simplement. Il faut arrêter de vouloir toujours performer, même en mangeant et en bougeant!
Souvenez-vous aussi que bouger a des effets positifs sur la santé mentale...
En 2024, on rapporte que la dépression et l'anxiété sont à la hausse chez les gens en obésité. Saviez-vous d'ailleurs que les personnes en obésité ou en surpoids ont de 20 à 40 % plus de risques de développer des symptômes de dépression ou d’anxiété? De même, il importe de prendre conscience que bouger permet de mieux contrôler le stress et l’anxiété, de réduire, voire atténuer les symptômes de dépression.
Effets pervers des préjugés liés au poids
Les préjugés liés au poids peuvent nuire à la qualité des soins et de vie. Une façon d’atténuer les préjugés, la stigmatisation et la discrimination liés au poids est de sensibiliser les professionnels et la société à leurs propres attitudes et réactions à l’égard du surpoids et de l’obésité ainsi que les dommages collatéraux faits à la santé mentale.
Il faut se souvenir que les causes de l’obésité sont multiples : facteurs génétiques, épigénétiques et neurohormonaux, certaines maladies chroniques associées, médicaments obésogènes, croyances et pratiques socioculturelles, déterminants sociaux de la santé, environnement, vécu des individus dont les traumatismes de l’enfance ainsi que les facteurs psychologiques tels que les troubles de l’humeur, l’anxiété, le trouble de l’accès hyperphagique, le trouble du déficit de l’attention, la piètre estime de soi et les problèmes identitaires. (Lignes directrices Obésité Canada, https://obesitycanada.ca/fr/quest-ce-que-lobesite/)
D'ailleurs, en consultation, ma première étape en tant que nutritionniste est de rétablir les faits. J'annonce que toute la démarche de changement que l'on fera ENSEMBLE sera un processus progressif, que nous allons procéder un pas à la fois, sans jeux de mots, et surtout dans le respect du corps! Par exemple, je regarde ce qui est consommé, ce qui est fait comme activité, la réalité du quotidien et est-ce que le tout se fait sans culpabilité dans le plaisir. On discute ouvertement des attentes versus de ce qui serait réaliste d’envisager à court, moyen et long terme comme changements pour la santé et le mieux-être.
Mes collègues nutritionnistes cliniciennes et moi rencontrons des clients en ligne ou dans le bureau à travers le Québec qui nous rapportent des situations/propos à saveur de grossophobie. Chaque fois, cela nous bouleverse. Nous faisons alors preuve de compassion envers la personne qui a eu à vivre cela.
Nous savons tous que cela ne date pas d’hier que le poids est une source de préjugés dans plusieurs sphères de la vie. Les médias et les établissements de la santé adressent le sujet du poids souvent d’une façon péjorative, ce qui affecte grandement la santé mentale des individus en surpoids. D’ailleurs, selon un sondage réalisé au Royaume-Uni, 88 % des individus en surpoids rapportent vivre de la stigmatisation à l’égard de leur poids. Environ 42 % des individus se sentent à l’aise d’en parler avec leurs médecins et à peine 26 % rapportent qu’ils ont été traités avec respect par les professionnels de la santé. Ces chiffres sont loin d’être négligeables!
La plupart des médias et politiques de santé présentent l’obésité comme la conséquence directe de l’adoption de mauvaises habitudes alimentaires! Ils recommandent donc tout simplement aux individus en surpoids de réduire leurs portions et d’éviter les aliments sucrés… Or, ceci est dévalorisant pour les individus en surpoids, car on assume dès lors que leurs habitudes peuvent être l’unique cause de ce surpoids!
Il a été démontré, de façon non surprenante, que la santé mentale se détériore souvent plus rapidement chez les sujets présentant de l’obésité. Ceci s’explique par le stress intense ressenti au quotidien. Ce dernier fait augmenter le taux de cortisol. Or, un taux de cortisol élevé de façon chronique peut mettre notre santé en danger!
L’élimination de la stigmatisation est indispensable pour faire progresser la science et prévenir réellement les risques sur la santé. Pour ce faire, la représentation des individus en surpoids dans le domaine de la santé doit évoluer.
Pistes de solutions
Lecture complémentaire : https://obesitycanada.ca/fr/prejuges-negatifs-relies-au-poids/
Lors du 83e Colloque de l’ACFAS, l’ensemble des conférenciers, soit des chercheurs et cliniciens du Québec, se sont entendus que l’on doit adopter une approche centrée sur la santé et non sur le poids, et qu’on doit non seulement utiliser un vocabulaire bienveillant et respectueux, mais qu’il importe de demander la permission avant d’aborder le sujet du poids. Le discours des professionnels devrait être axé davantage sur les habitudes de vie et non sur le chiffre sur le pèse-personne.
Ce qui m'amène à aborder la pression du fitness...
Les résultats d'un sondage réalisé par Léger pour le compte d’ÉquiLibre à l’automne 2023* nous a fait sursauter : 41 % des Québécois et Québécoises rapportent que l’industrie du fitness influence leurs croyances, attitudes et comportements en lien avec leur corps et l’activité physique. Cette proportion s’élève à 67 % chez les 18 à 34 ans!
Sachez que l'on peut bouger et s’entraîner à faible intensité pour prendre soin de soi, gérer son stress, favoriser le sommeil, briser l’isolement, etc.
De plus, il importe de le faire dans le plaisir pour avoir envie de répéter l'expérience. Il suffit de trouver ce qui vous allume et favorise votre mieux-être. N'allez pas dans un cours de groupe si vous êtes de type solitaire ou ne faites pas une activité parce que votre ami.e le fait ou que l'on vous casse les oreilles à quel point c'est cool, la tendance de l'heure, etc!
Et on ne le répètera jamais assez : Nul besoin d’un corps d'athlète ni d'être génétiquement un athlète pour faire de l’activité physique! On respecte évidemment nos limites si on a une condition de santé, on y va à notre rythme, mais on le fait avant tout pour soi et avec de la gratitude pour ce que notre corps nous permet d'accomplir et de ressentir.
Enfin, sachez que selon la littérature, les personnes en surpoids ayant une bonne capacité cardiorespiratoire ont moins de risques pour la santé que celles minces qui n’ont pas cette capacité. Nul mention dans cet énoncé d'IMC idéal ni de capacités d'athlète!
En résumé, le message de nos nutritionnistes est à l’effet que qu'il faut être bien dans sa tête et son corps et que cela ne requiert ni un format corporel précis ni des standards athlétiques! Et il faut veiller à ce que nos mots ne se transforment pas en maux...
Si vous avez besoin d’aide d’un professionnel de la santé ayant une expertise en nutrition humaine et clinique qui a une approche bienveillante, consultez sans plus attendre l'un.e de nos diététistes-nutritionnistes pour obtenir de l'aide.
https://www.nutrisimple.com/fr/consultations/
Références
Brown A, Flint SW, & Batterham RL. (2022). Pervasiveness, impact and implications of weight stigma. EClinicalMedicine, 47, 101408. https://doi.org/10.1016/j.eclinm.2022.101408
Léger pour le compte d’ÉquiLibre. (2023). Préoccupations envers le poids, l’alimentation et la pratique d’activité physique. Sondage réalisé du 2 au 11 octobre 2023 auprès de 1 803 Québécois et Québécoises de 14 ans et plus.
Changez votre vie en un seul clic!
Remplissez le formulaire ci-dessous et nous vous contacterons afin de fixer un rendez-vous au moment qui vous convient le mieux.