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ALIMENTS GRAS ET SUCRÉS, EST-CE UNE DÉPENDANCE?

Nutritionniste-Diététiste Québec, Beauport, Beaupré, Sainte-Foy, Neufchâtel, l'Ancienne-Lorette ou Val-Bélair avec Marlène Bouillon par Marlène Bouillon, Dt.P., Ph.D., Nutritionniste-Diététiste et docteure en physiologie/endocrinologie, Vice-présidente et directrice scientifique

ALIMENTS GRAS ET SUCRÉS, EST-CE UNE DÉPENDANCE?


Attirance pour les aliments gras et le sucré : un réseau neuronal impliqué
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Chaque jour, en tant que nutritionniste-diététiste clinicienne, et il en est de même pour mes collègues nutritionnistes, nous rencontrons des clients qui affirment « Je dépends du sucre et/ou du gras, j'ai faim sans cesse, je pense qu'à grignoter. Pourquoi est-ce uniquement les aliments sucrés ou gras qui me satisfont? »

Qu'il s'agisse de gâteau, de gruau, de brocoli, d'un steak ou des frites, la digestion s'enclenche et produit un afflux de glucose, d'acides gras et d'acides aminés, etc. En fonction du type, de la quantité et de la combinaison des aliments consommés, le corps recevra du glucose, des acides gras et des acides aminés en quantités et à des vitesses variables, mais le corps n'est pas en mesure de distinguer la provenance du glucose, des acides gras et des acides aminés. Il ne met pas non plus d'étiquette « bon » ou « mauvais »...

Nos 50 nutritionnistes et plus travaillent justement à une saine gestion du poids et de la relation avec les aliments, que cette dernière soit troublée ou carrément devenue un trouble du comportement alimentaire. Nos nutritionnistes procèdent d'ailleurs à un questionnaire détaillé lors de l'évaluation et détectent assez rapidement, selon les réponses aux questions, si la personne présente un trouble de l'alimentation. C'est d'ailleurs une explication plus plausible des comportements dits de « dépendance à l'égard de la nourriture » que de la dépendance selon les critères cliniques appliqués à d'autres substances dites addictives.

Heureusement, nous disposons d'un grand nombre d'études sur les moyens pour aider les personnes à se libérer des troubles alimentaires. L'une des méthodes courante et efficace consiste à s'exposer fréquemment à des aliments déclencheurs, ce qui permet de réduire la réaction émotionnelle qu'ils suscitent et d'apprendre à les apprécier sans les voir comme des interdits ou leur attribuer une valeur surajoutée. Il est assez bien reconnu que l'exposition à des aliments déclencheurs réduit les accès hyperphagiques, l'impulsivité alimentaire, voire la culpabilité. 

Si le client verbalise dans le bureau ou en ligne à la nutritionniste un sentiment d'être dépendant du sucre, on va penser souvent à regarder du côté d'un déséquilibre chimique, notamment la dopamine.

Il est également important de souligner que pour de nombreux individus, le fait d'attribuer une dépendance à leur relation avec la bouffe peut atténuer la honte ressentie à l'égard des comportements alimentaires présents. On nous mentionne souvent avoir reçu des commentaires du genre « c'est un manque de volonté, prends-toi en main! ». Pour la personne qui ne peut s'empêcher de manger constamment des sucreries ou des aliments gras, ce genre de commentaire culpabilise en plus de mettre en situation d'échec. Pourtant, ce n'est pas une question de volonté ni la dépendance. Il faut plutôt regarder les dommages collatéraux du cycle de la restriction et de la culture des diètes, le tout alimenté par la honte, voire des conditions réelles non traitées. 

Mais regardons plus attentivement ce que la science à de nouveau à dire au sujet de l'attirance pour les aliments gras et sucrés...

Le désir de décoder le phénomène sous-jacent au fait que certains individus sont attirés par des aliments moins sains fait l’objet de recherches de longue date. Il est connu que le nerf vague transmet au cerveau des informations sensorielles internes provenant de l'intestin quant à la valeur nutritionnelle des aliments. En revanche, la base moléculaire de la récompense cérébrale associée à ce que nous mangeons n’est pas complètement comprise.

Une étude publiée tout récemment dans le journal Cell Metabolism a permis de faire un pas de plus dans la compréhension du phénomène en mettant en évidence un réseau neuronal interne entre l’intestin et le cerveau, avec des voies distinctes pour l'envie de gras et de sucre.

Fait perturbant...
La combinaison de ces voies activerait excessivement notre désir de manger!

« La nourriture est un renforçateur ultime, mais la raison pour laquelle les graisses et les sucres sont particulièrement attirants reste une énigme. Nous venons d'identifier que les cellules nerveuses de l'intestin, plutôt que les cellules gustatives de la bouche, sont un élément-clé. Nous avons découvert que des voies distinctes entre l'intestin et le cerveau sont recrutées par les graisses et les sucres, ce qui explique pourquoi un beigne ou une pâtisserie peut devenir si irrésistible. » — Guillaume de Lartigue, auteur principal de l'étude

Ce nouvel élément vient donner des précisions sur ce qui contrôle le comportement alimentaire motivé. Ainsi, un désir interne subconscient de consommer une alimentation riche en graisses et en sucres pourrait potentiellement créer des embûches aux efforts conscients de changements chez certains individus.

Regardons plus en détails cette étude afin de mieux comprendre ce qui a été fait et la portée des résultats.


Méthodologie et résultats
Les chercheurs ont utilisé une technologie de pointe pour manipuler directement les neurones à graisse ou à sucre dans le système du nerf vague.

Ils ont été ainsi en mesure de mettre en évidence que les deux types de neurones provoquent une libération de dopamine dans le centre de récompense du cerveau chez la souris. La dopamine est un neurotransmetteur du système de récompense libéré par les neurones pour « signaler » qu’un événement/comportement est « positif ». Par conséquent, lorsque le système de récompense s'enclenche, il en résulte un renforcement des comportements. Ainsi, on devient plus susceptible de les répéter. Les poussées de dopamine provoquées par la consommation de sucre et de gras favoriseraient donc un renforcement ou rétroaction rapide, ce qui nous porte à préférer ces aliments.


Mais revenons à l'étude...

Il y aurait deux voies spécifiques du nerf vague : l'une pour les graisses et l'autre pour les sucres. Ces circuits, qui trouvent leur origine dans l'intestin, transmettent au cerveau des informations sur ce que nous avons mangé.

Plus spécifiquement, pour déterminer comment les graisses et les sucres affectent le cerveau, l'équipe a stimulé les nerfs vagues intestinaux avec de la lumière. Cela a incité les souris à rechercher activement des stimuli qui font appel à ces circuits. Les résultats indiquent que les sucres et les graisses sont détectés par des groupes de neurones distincts du nerf vague et qu'ils engagent des circuits de récompense parallèles, mais distincts pour contrôler le renforcement spécifique. (c.f. image ci-bas)


Et tel que mentionné précédemment, l'activation simultanée des circuits des graisses et des sucres crée une puissante synergie.  « C'est comme un coup de fouet donné au système de la récompense du cerveau. Même si le nombre total de calories consommées en sucre et en graisses reste le même, la combinaison des graisses et des sucres entraîne une libération nettement plus importante de dopamine et, en fin de compte, une suralimentation chez les souris. », explique le chercheur Guillaume de Lartigue.


Cette étude chez la souris pourrait contribuer à expliquer pourquoi il est si difficile pour certains individus de faire des changements d’habitudes et de comportements alimentaires.  Selon le chercheur, « leur cerveau pourrait être programmé pour rechercher des combinaisons riches en graisses et en sucres, indépendamment des efforts conscients pour ne pas le faire. Cette communication entre les intestins et le cerveau se passant au niveau subconscient. »

Bref, les chercheurs estiment cette voie de recherche est porteuse d'espoir pour le développement futur de stratégies. Le ciblage et la régulation des circuits de récompense intestin-cerveau pourraient constituer une nouvelle approche pour lutter contre les habitudes alimentaires moins saines. La manipulation de ces circuits intestinaux pourrait même constituer une cible thérapeutique, chez les individus présentant de l'obésité, en facilitant la réduction volontaire de la consommation d'aliments qui nuisent à la saine gestion du poids, par exemple.

« Comprendre le schéma de réseautage de notre motivation innée à consommer des graisses et des sucres constitue la première étape. Cette recherche ouvre des perspectives passionnantes pour des interventions personnalisées qui pourraient aider les gens à faire des choix plus sains lorsqu'ils sont confrontés à des combinaisons très alléchantes. »

 

Limitations de l'étude mentionnées par les auteurs
Le modèle de souris génétique utilisé est TRAP2. Les limites de cette approche sont qu'elle s'appuie sur le promoteur de Fos, et ainsi, seuls les neurones activés en réponse à un stimulus ont été ciblés. Par conséquent, il est difficile de déterminer dans quelle mesure les neurones à forte activité constitutive ou qui n'expriment pas Fos sont impliqués dans le renforcement de la consommation de graisse et de sucre. Toutefois, ceci ne constitue pas un obstacle majeur lorsque l'on étudie les neurones sensoriels vagaux qui sont presque exclusivement glutamatergiques. Cela étant dit, des approches supplémentaires in vivo à résolution unicellulaire devront être utilisées pour élucider complètement la complexité des circuits neuronaux centraux pour le renforcement de nutriments distincts.


Conclusion
Que l'on se comprenne bien : ces résultats ne veulent pas dire que toute démarche de changement est vaine! On vise plutôt dans cet article de blogue à sensibiliser à un facteur de plus à considérer au moment de mettre des stratégies en place avec votre nutritionniste-diététiste, facteur qui peut échapper à l'analyse de prime abord puisqu'il relève du subconscient. Et on espère que cela contribuera aussi à déculpabiliser certains individus qui croient qu'ils n'ont simplement pas assez de volonté pour faire de meilleurs choix...

Bien sûr, c'est plus facile à dire qu'à faire! Lorsque nos nutritionnistes travaillent avec des clients qui ont un trouble de l'accès hyperphagique, de l'impulsivité alimentaire, de la boulimie ou qui ont l'impression d'avoir une dépendance à la nourriture, nous fournissons les outils nécessaires pour réintroduire les aliments gras et sucrés de façon à leur redonner confiance en eux. Si vous pensez que vous pourriez bénéficier du soutien d'un.e nutritionniste-diététiste/diététicien.ne pour faire la paix avec la nourriture, n'hésitez pas à nous contacter!



Article mentionné
McDougle, M., et al. Separate gut-brain circuits for fat and sugar reinforcement combine to promote overeating. Cell Metabolism 2024;36:393-407. doi.org/10.1016/j.cmet.2023.12.014.

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